Une photo en dit long mais peut-être pas assez. Une photo dévoile les secrets à moins qu’elle ne les déforme ou ne les transfigure.

La ligne blanche est-elle bien placée ? C’est une question que pourrait se poser le groupe d’athlètes à proximité à défaut de commencer à se préparer pour l’échéance.

En effet, en ce début d’année la réfection de la piste du Pellez à Clermont-Ferrand a provoqué son petit lot de polémique. Mais au delà de celui-ci c’est la participation des athlètes qui importe. L’athlétisme pour ce qui concerne la piste s’est mué depuis quelques décennies (seulement on va dire !) en deux saisons distinctes. Là où la préparation se faisait sur une année, il faut compter aujourd’hui sur des demies saisons avec pour phase intermédiaire finalement la saison hivernale en salle, tremplin pour les performances estivales qui fondent le cœur de la discipline.

De plus en plus d’athlètes y participent, de plus en plus d’entraineurs l’incorporent dans la programmation. Est-ce profitable ? Chacun saura en tirer une conclusion à l’aune de ses références.

Ici c’est tout de même l’occasion de se regrouper entre athlète d’un même club ; c’est aussi l’opportunité de tester le rendu des entrainements commencés en août.

Dans cet espace ultra rectiligne, dans cet espace dont les parallèles horizontales (les couloirs) et verticales (les poteaux, les rambardes) se font concurrence, une forme de flou artistique se dessine. Suggéré par le reflet sans doute, ce flou provenant de la salle officielle chronométrique semble suggérer le côté aléatoire des résultats personnels.

Oh que non, le chrono est fiable, déclenché électroniquement et bénéficiant d’un réglage photo électrique de fin de course. Mais les performances sont toujours le fruit de la rencontre d’une expérience et d’un contexte. L’expérience est la résultante des entrainements, de leurs qualités et leurs quantités mais aussi des compétitions déjà réalisées forgeant des habitudes et des rituels, eux-mêmes éloignant quelque peu le stress de la préparation. L’expérience amenuise la pression et les distractions. Normalement. Le contexte quant à lui doit être apprécié de manière très personnelle : dans quel état suis-je à ce moment précis et dans ce lieu précis ? Que me renvoie l’atmosphère sensorielle de la salle (visuelles comme les couleurs, ou les charges informationnelles que procurent tous les éléments/objets ; auditives comme la résonnance des sons ou l’impact de la foulée sur le sol ; kinesthésiques comme l’amortie ou le rebond procuré par ce même sol, la relative humidité ou fraicheur…). Que me renvoie l’atmosphère émotionnelle de la salle ; celle provoquée par l’ambiance des spectateurs, la relation aux adversaires mais aussi à mes partenaires sans oublier celle au coach s’il est présent ou à son image s’il n’est pas là ?

Donc oui, une performance est tellement dépendante de l’idée qu’on s’image et qu’on cristallise pour performer. Les circonstances me perturbent-elles ? Mes croyances me guident-elles ? Mince ! Je viens d’arriver un peu tard et j’ai tronqué une partie de ma préparation ! Aïe ! Mes amies ne sont pas présentes car elles concourent à côté. Si je cours sur la partie verte serai-je défavorisé ? Tout cela influe-t-il donc ? Ou est-ce dans ma tête ?

Et comment éloigner les influences extérieures pour se concentrer sur soi et se faire confiance ? C’est ici tout l’art des bons athlètes… l’art d’enlever les flous qui les entourent et qui pourraient les happer ; l’art de supprimer les reflets purement auto-fabriqués et illusionnistes pour n’agir qu’au regard des quelques certitudes acquises aussi minimes soient-elles.

Et qu’importe alors le placement de la ligne…

Et non, ici le groupe de filles de l’EAMYA se concentrent en fait sur l’échéance imminente.