La récompense, chacun le sait, valorise la personne qui l’obtient. A la base, récompenser est un acte bienveillant qui a pour but de mettre en exergue la performance non ordinaire ou au-dessus de la moyenne. Car il faut bien le dire, le résultat obtenu, qu’il soit le fruit d’une action ou une production, mérite une reconnaissance exemplaire qui par-dessus tout, l’exalte. Le récepteur vit un moment important où son action, ses efforts à court, moyen ou long termes sont reconnus et mis en avant. Glorifié en un instant, une part de son estime de lui-même prend de la hauteur en espérant qu’elle perdure.

La récompense se mérite donc et très souvent c’est le cas ! (Par défaut, un grand chanceux peut en profiter !!!). Reste à savoir les circonstances dans lesquelles elles sont données…

Ces récompenses sont attribuées au regard de la performance des autres. Elles sont l’aboutissement d’un classement défini sur des critères divers selon l’activité, valorisant les premiers sans pour autant dévaloriser tous ceux qui restent dans la fin de liste (y compris pour les actes héroïques).

Certaines pratiques en classe valorisent elles-mêmes les élèves par des images signifiant que le travail a été jugé satisfaisant par l’enseignant (de moins en moins aujourd’hui utilisent ce procédé bien qu’on le retrouve encore de temps à autres). Certains élèves n’en reçoivent donc que très peu malgré leurs efforts pour les obtenir. C’est pourquoi de multiples occasions de recevoir des images sont alors proposées (sur le comportement et les savoirs). Elles doivent ainsi permettre à chacun d’obtenir le Graal. Ne pas recevoir l’image implique que les réalisations ne correspondent pas aux critères de jugement de l’enseignant. Car oui, l’enseignant juge ne laissant donc pas de ce fait à l’enfant  le plaisir de sa production qui, ne nous trompons pas, est pourtant toujours faite le mieux possible. L’enfant veut plaire à l’adulte… et il ferait n’importe quoi pour ses parents ou pour tout autre adulte référent !!!  L’adulte ne laisse donc guère non plus la place à la parole de l’enfant et à ses ressentis sur son activité, la parole sur la reconnaissance des critères d’amélioration. Il est donc sanctionné par le jugement dominant du référent car dans les croyances, c’est à l’adulte d’être le tuteur (au sens de la voie unique à suivre). Difficile alors à l’enfant de s’épanouir et de ne pas viser la concurrence. Est-ce un objectif pédagogique ? Et pourtant l’adulte pourrait simplement rester le guide…

A l’origine donc, le principe de la récompense est celui décrit plus haut. Le problème est que, souvent, cette dernière est attribuée aux mêmes personnes. Il n’y a en effet que trois lauréats… et puis les autres !

C’est pourquoi depuis quelques années, ce ne sont plus les trois lauréats qui sont récompensés mais une majorité des participants de l’activité (d’où certaines évolutions citées plus haut chez certains enseignants). Ce phénomène est même exacerbé autour de la pratique sportive des enfants pour généraliser la récompense à tous les participants. Mais quelle est donc alors la valeur intrinsèque de la récompense ? Etre récompensé parce qu’on a participé et qui plus est à une activité difficile ?

La possibilité offerte de participation n’est-elle pas déjà une récompense notamment par le fait qu’une organisation efficace et attrayante a été proposée aux enfants ? Pour les enfants, le fait d’avoir participé et de s’être amusés n’est-il pas déjà une récompense ?

Je ne vous donne pas mon point de vue, vous l’avez certainement déjà cerné ne serait-ce que par ces types de questionnement. Alors à quoi bon surajouter une récompense si ce n’est pour offrir un souvenir. Le souvenir de la participation à mon sens se traduit dans la mémoire et les sensations que les enfants ont pu vivre et non dans la médaille. Si volonté d’offrir un souvenir alors pourquoi la médaille, cet objet symbolique qui perd dans cette occurrence toute sa valeur ? Un souvenir peut tout à fait être le partage du jus de fruit avec tous les participants (moments qui se perdent dans notre société et pour lequel nous pourrions être les médiateurs) mais si l’organisateur veut offrir un objet non périssable (dans notre monde matérialiste), cela peut être aussi un stylo ou au mieux un diplôme indiquant des références de l’action réalisée…

Et plus que cela, tout comme la sanction n’est sans aucun doute pas la solution pour favoriser l’adhésion au travail, la récompense, qui très certainement était introduite pour fidéliser les participants, ne semble pas non plus avoir l’effet escompté. Elle ne permet pas de fidéliser le pratiquant. Je le répète une fois de plus : au-delà de la récompense, c’est le sens de l’action qu’il faut valoriser ; c’est la présence et les encouragements des adultes pour une pratique sportive (dans notre cas) qu’il faut susciter ; c’est l’accompagnement de l’enfant au plus proche de ses préoccupations, le fait de le rassurer, de l’aider à progresser, de le guider à travers une activité positive et adaptée, de lui permettre la meilleure construction de ses compétences motrices et de sa personnalité auquel il faut veiller.La médaille n'y contribue pas car ne détient pas cette dimension.

La récompense matérielle n’a donc pas de sens en soi. Elle serait même contre-productive car non accompagnée par les éléments nommés juste au-dessus, non accompagnée car la récompense serait proposée quasiment à chaque fois comme une fin en soi. La présence humaine bienveillante et effective (affective aussi) ne peut être remplacée. La récompense la plus intense pour les enfants est donc la participation accompagnée. Encore une chose qui modifie nos manières de percevoir le monde ou l’activité… qui met sans doute en branle nos représentations.