Une photo en dit long mais peut-être pas assez.

Une photo dévoile les secrets à moins qu’elle ne les déforme ou ne les transfigure.

Il faisait beau ce jour là en témoigne l’arrière plan de l’image. Un soleil rayonnant de début ou de fin de journée. Pas ce soleil qui tape du dessus mais celui qui provient du côté ; celui qui, rasant, provoque la pupille lors de nos sorties matinales ou de soirée. Celui qui ne réchauffe pas le corps mais plutôt le mental. Parce qu’il est toujours plus agréable de se mouvoir sous les caresses du rayonnement. Et ce soleil ici n’est que le reflet de la vie qui tourne et enchante. Il nous donne l’entrain et le train. Ce soleil vient de la droite de l’image ; il est caché par la haie d’arbres à l’endroit où le photographe se trouve car certainement à un autre endroit, il devenait gênant.

Là encore (voir histoire d’images du 11 octobre 2011), il s’agit sans nul doute du début de la course. Le groupe de coureurs n’est pas encore effiloché. Les athlètes sont encore par équipe (ceux du RCV ou Philippe Benoît avec Clément Leca pour notre club). Les corps et les visages sont relativement frais et sereins.

Quel intérêt alors à cette photo si ce n’est montrer les demi-fondeurs en action, laisser une trace de l’effort, des présences ; laisser un souvenir, un témoignage… ?

Quel est l’intérêt si ce n’est d’encore témoigner de l’incessant besoin de mouvement de l’être humain pour se sentir exister dans ce monde technique, technologique, sophiste dans lequel l’intellect prime aux dépends de l’action… ?

Quel est l’intérêt si ce n’est pour une énième raison interpeler sur le besoin de se confronter à l’effort, au classement, à ses possibilités, à la vie… ludique certes mais ascétique indubitablement. Car on n’aurait très bien pu se contenter d’aller faire une simple marche, un match de hand ou un jeu de playmachin…

Non ! Ici, on prend un risque. Oui ! Cette image montre l’attitude de ses hommes (et femmes) qui, par la confrontation à eux-mêmes et aux autres prennent le risque de ne pas réussir l’entreprise commencée, de voir apparaître des désillusions quant à leur ambition personnelle et individuelle de performance ; le risque aussi de ne pas résister à l’effort qu’ils s’infligent ; le risque de ne plus être ce qu’ils croyaient être d’eux.

Et à l’image de ce soleil caché, qu’adviendra-t-il de la fin de la course pour laquelle le chemin est encore long ? S’éloigne-t-on de la lumière ou allons-nous plutôt la retrouver ? Dans tous les cas, ils sont partis la rechercher.

Philippe ici se sent inévitablement bien, prenant le temps de regarder le preneur d’images comme pour le défier et défier son destin, avec en sus le pouce lever pour signifier, volontairement ou pas, l’attitude et le ressenti du moment. Clément, à l’opposé, est concentré sur la suite à venir mais un sourire semble pointer de son visage. Ces deux coureurs que la pratique athlétique originelle oppose (l’un est spécialiste des longues distances tandis que l’autre était plutôt sur le tour de piste) se rejoignent l’espace d’un instant de leur existence sportive tant au niveau concret du côtoiement physique lors de cette course que dans l’idée abstraite de la recherche d’un idéal personnel (du moins au niveau de la course à pied)…

Merci encore aux photos de Serge Citon  ou à Serge Citon pour ces photos.

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