Régularité de quoi ?

Le changement de paradigme est d’autant plus grand que les représentations sont prégnantes.

Il se fera dans le temps et l’explication pourra être longue. Non qu’elle soit fondamentale à l’activité mais elle est ancrée dans les esprits comme peut l’être toute croyance populaire. S’en est sans doute une ! La voici.

On a appris et on apprend encore à l’école et dans les clubs que la régularité de vitesse était à construire. Ce n’est pas faux mais pas exacte non plus ! Sans doute un peu plus vrai pour l’allure et encore !

Connaissez-vous un coureur capable de réaliser une course de bout en bout exactement à la même vitesse voire à la même allure ?

Savez-vous qu’un coureur de 10 km change d’allure plusieurs fois au cours de sa course : ne serait-ce qu’au début cause d’un départ souvent trop rapide et rédhibitoire ; à la fin sur les deux derniers km car l’énergie est psychologiquement reprogrammée à l’approche de la délivrance mais aussi entre le 5^ème et le 8^ème km par un effet étrange de relâchement si ce n’est physique alors mental. Et ne parlons pas du coureur de piste sur 800 ou 1500 qui doit pouvoir modifier sa vitesse sur 100 m de plus 50%. Les traileurs ne sont pas en reste avec la nécessité parfois de faire l’impasse même de la motricité course au profit de celle de la marche.

La régularité de vitesse et pas plus celle d’allure n’existe en définitive vraiment et ce n’est pas la faute du terrain ou des conditions atmosphériques : du moins pas uniquement.

Donc à quoi bon en parler si ce n’est pour planifier à mot couvert la nécessité de réaliser un temps proche de ses capacités supposées définies par les tests VMA de toutes sortes.

Non car le plus important dans la nouvelle approche est de considérer la course comme un déplacement continu et efficace. Il en va certes de la nécessité de maintenir une vitesse mais cette dernière doit être la plus optimale possible selon le terrain, l’atmosphère, les données personnelles du moment tant au niveau physique que physiologique ou psychologique. L’idée est alors plus de valoriser la capacité à rendre la course de plus en plus rapide sur une longue durée. Et donc à quoi bon travailler la régularité de vitesse ou d’allure alors que le théorème porterait sans doute plus sur la régularité du déplacement.

Pour rendre ce dernier efficace, le coureur doit donc apprendre à transférer les temps de marche en temps de course puis ou de manière concomitante la durée de temps de marche en une durée plus longue de temps de course, enfin la course en un déplacement plus rapide parce qu’efficace et économe. Cela passe donc par l’acquisition de l’endurance fondamentale mais aussi des capacités de vitesse. Et plus que tout, cela passe par la capacité à changer d’allure, à accélérer lorsqu’il le faut, voir l’inverse si c’est trop insupportable car la capacité à changer d’allure détermine la plupart du temps la capacité à courir vite et longtemps et par extension à gérer les changements de vitesse.

Garder la même allure si tant est que cela puisse être possible n’est-il pas contre-productif car engendrant une course non portée sur le ressenti personnel ? Personne ne court par ailleurs de la même manière et pourtant tout le monde cherche à courir avec quelqu’un en course. Chacun doit donc savoir adapter sa course à celle de l’autre c’est-à-dire savoir changer et modifier son déplacement plus que courir toujours de la même manière.

Nous sommes donc bien ici plus dans une régularité de déplacement qu’une régularité d’allure. Fin d’un début d’argumentation… Et ceci doit donc faire l’objet d’un apprentissage et d’un changement de paradigme d’entrainement.

Cette approche est celle en partie proposée pour les enfants de moins de 12 ans dans l’apprentissage de la course qui au-delà du travail sur des fractionnés productifs qu’à court terme (quelques années peut-être) rendent le coureur obsolète à l’adolescence car incapable de produire d’autres efforts que celui auquel il aura été programmé. Les situations proposées devraient alors plus reposer sur ses capacités d’adaptation à différents contextes après qu’il ait acquis la capacité à courir dans un contexte adapté. Et ces situations sont généralement des situations de « jeu ».

Les situations doivent s’adapter à l’enfant avant qu’il ne s’exerce lui-même à s’adapter à diverses situations pour qu’enfin mais bien plus tard, il ne commence à stabiliser ses compétences dans des situations précises basées pourquoi pas là sur l’allure. D’autres arguments concourent à cette mouvance pour les enfants mais ce n’est pas ici le sujet.

Et ce théorème est aussi vérifiable chez les adultes d’autant qu’ils sont jeunes coureurs ou coureurs programmés ! Une « piste » : le fartlek… mais le vrai, l’originel !